Nouveau stade – Obstruction à la démocratie citoyenne à Guipavas !
Samedi dernier, j’avais l’intention d’assister à une réunion organisée par un collectif de citoyens qui s’opposent à la construction du nouveau stade au Froutven. Ayant été informé par un membre du collectif qui m’avait interrogé sur mes notes concernant le financement du stade (ici), j’avais décidé d’aller écouter leurs arguments.
À ma grande surprise, la maison de quartier de Coataudon à Guipavas était fermée lorsque je suis arrivé pour la réunion. Deux jours plus tôt, le maire avait retiré le droit d’utiliser ce lieu public pour la réunion. Le Collectif devait se suffire du parking pour expliquer l'annulation de la réunion.
La raison invoquée par l’édile de Guipavasien était de ne pas avoir été mis au courant de la nature de la réunion et de supputer qu’elle allait être une source de désinformation. Il avait également justifié l’annulation de la réservation par la nécessité de maintenir l’ordre public.
L’ordre public à Guipavas semblait-il être en danger, par ce froid samedi matin de janvier ? Si une trentaine de personnes calmes, principalement des retraités et des habitants, se réunissant pour discuter peuvent perturber l’ordre public, je me demande comment le maire qualifie les blocages des agriculteurs ayant cours en ce moment… Une troisième Guerre mondiale, probablement !
Idem, au-delà de cet Armageddon tant redouté à la maison de quartier de Coataudon, que penser d’un maire refusant que des citoyens organisent une réunion, sous le prétexte qu'il la juge comme de la désinformation, avant même la réunion. Va-t-il interdire toutes réunions politiques qui ne seraient pas en ligne avec sa pensée ?! Cela en dit long sur la nature du régime politique à Guipavas dans la période !
Il est clair que derrière ces arguments fallacieux et déplacés, se cachent des enjeux financiers importants autour du projet de stade. A l’instar du président de la métropole, le maire de Guipavas semble vouloir protéger à tout prix le grand stade LE SAINT / ARKEA, au Froutven, et les intérêts moins footballistiques qu'économiques et financiers qui se cachent derrière.
Avant la réunion, le collectif avait publié et distribué aux habitants de Guipavas un tract d’invitation contenant les questions auxquelles ils souhaitaient apporter des réponses (voir ci-après). La réunion semblait d’ailleurs moins relever d’un débat que d’une information publique aux habitants.
J’avais lu le tract et les 14 questions posées, avant la réunion. A part une ou deux auxquelles je ne connaissais pas la réponse, toutes les autres apportaient des éléments factuels, conformes à ce que les porteurs du projet et la métropole avaient eux-mêmes annoncés lors des différentes conférences de presse données depuis un an. Rien de nouveau, rien d’explosif, juste des interrogations et une mise en perspective, au regard d’autres enjeux que les seuls exprimés par les porteurs du projet.
Le but de ce Collectif est de questionner la pertinence de la construction d’un nouveau stade, préférant une rénovation du stade Francis Le Blé (comme cela se fait dans d’autres villes). Une option tout à fait possible, mais aussi et surtout beaucoup moins chère. Une étude de 40 000 € a été réalisée par la métropole sur le sujet. Elle semble estimer cette rénovation tout à fait faisable pour un coût de 50 millions d’euros. Cependant, malgré le caractère public du document, puisqu’il a été payé avec nos impôts, le président de la Métropole refuse de le rendre public, sans aucune raison objective à cela (si ce n'est risquer de montrer qu'un nouveau stade est une gabegie d'argent public). Il y a donc bien quelque chose qui cloche. « Quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup », nous disait bien une certaine Martine Aubry !
Museler une réunion publique de citoyens qui ont simplement un avis différent et cacher des documents d’analyse publics qui permettraient à chacun de se forger sa propre opinion témoignent clairement d’une dérive autoritaire dans la gouvernance de la métropole autour du projet d'un nouveau stade.
Ce projet, prétendument privé, mais financé en majeure partie par des fonds publics, coûtera le double d’une rénovation de Francis Le Blé (130 M€ contre 50 M€, soit 160 % de plus). Par ailleurs, il continuera à grignoter inutilement des terres agricoles. Ce projet au Froutven n’a pas de sens tant pour la bonne utilisation de l’argent public que pour les enjeux écologiques. Le seul intérêt (non-dit) est d’offrir un cadeau à des acteurs privés du territoire, pour plusieurs décennies. De l’argent qui pourrait être bien mieux utilisé pour d’autres rénovations publiques dont notre territoire a grand besoin : gymnases, écoles, maisons de quartier, maison de santé, sécurité, etc…[1]
Cette réunion publique devrait être reprogrammée dans les prochains jours. Je pense que j’y serai !
Ci-dessous, le tract annonçant la réunion publique et les questions fort légitimes mises au débat.
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[1] Je vois déjà des élus s’esclaffer en répondant qu’il s’agit là de politiques municipales, quand le nouveau stade doit être financé par la métropole. La belle histoire ! C’est oublier un peu le transfert de 15 M€ que la ville de Brest a annoncé faire à la métropole, soi-disant pour le couteux tramway, mais qui correspond quasi exactement au montant que la métropole compte mettre dans le nouveau stade. L’adjoint et le vice-président aux Finances que je fus sais pertinemment que le budget de ma métropole est fongible, c’est-à-dire que les rentrées ne sont jamais associées à des dépenses, l’argent est liquide.
Alors, un nouveau stade réellement financé par la Métropole … ou la Ville de Brest ?
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On appelle ça la non affectation des ressources aux emplois. A l’école, on l’illustre par la parabole du manteau de vison, ou de la bague en diamant (https://books.openedition.org/pressesmines/477 ).
Bonjour Michel,
Merci pour cet éclairage comptable que je ne connaissais pas.
Il pourrait être reproché à la parabole du manteau de vison d’être un peu stéréotypée entre les genres, mais elle permet de bien comprendre l’ambiguïté comptable dont se servent nos chers élus de la ville et de la métropole de Brest.
…avec des conséquences désastreuses.
Un exemple (mais j’en ai d’autres) :
Le service en charge du scolaire et péri-scolaire est intéressé à mettre en place le Savoir Rouler à Vélo. Une session coûte 1300 euros (à multiplier par le nombre de classes de CM2). Le programme de Certificats d’Economie d’Energie « Génération Vélo » rembourserait intégralement la collectivité, mais cela ne retomberait pas dans le budget du service et donc le SRAV lui coûterait bien 1300, beaucoup trop pour son budget, et donc les enfants n’en bénéficieront pas et Brest ne touchera pas la subvention.
Oui, j’ai aussi connu ce paradoxe sur de nombreux sujets en lien avec l’environnement ou les économies d’énergies, par exemple. Investir dans l’éclairage public permettait de baisser les consommations, mais ces dernières n’étaient pas comptées sur les recettes du service. Je crois me souvenir que sous l’impulsion d’Alain Masson, cela avait un peu changé.
Il fut un temps où Michel Briand bataillait pour développer la fibre, arguant que cela rapportait plus que la dépense… Mais là encore, les recettes étaient comptées ailleurs et décallées dans le temps. Les budgets demandés ne lui étaient jamais accordés.
La notion de ROI est très difficile à faire comprendre dans une collectivité… Ou alors, cela cache juste la façon d’argumenter de ceux qui ne veulent pas que les sujets concernés avancent.
M. Cuillandre adore faire réaliser à l’ADEUPa des études économiques pour justifier ses fêtes nautiques ou le passage du Tour de France, en expliquant que chaque euro dépensé par la collectivité en aura généré 3, 4 ou 5 € dans le tissu local ! Comme quoi, lorsque l’on veut, on sait faire !
Idem pour les 15 M€ de subventions de la ville de Brest au tramway qui semblent affectées aujourd’hui, alors qu’ils correspondent plus au coût consolidé du stade pour la métropole.